Exposition “La Collaboration” aux Archives Nationales

Pour le 70ème anniversaire de la Victoire de 1945 les Archives Nationales rendent hommage à la… Collaboration

« La Collaboration » – c’est le titre d’une exposition proposée par les Archives Nationales du 26 novembre 2014 au 2 mars 2015. L’exposition présente beaucoup de documents fort intéressants et impressionnants, mais voilà que le contexte dans lequel ce contenu est livré nous laisse perplexes. En effet, pour tout dire, l’exposition donne une nette impression de plaidoirie pour les collaborationnistes. Le mot clé en est « diversité ». C’est, d’après le texte affiché à l’entrée, ce qu’il faut surtout voir dans la Collaboration. En faisant un tour on comprend que les collabos étaient au fond patriotes. Qu’ils défendaient des valeurs qui ne sont pas forcément mauvaises : Travail, Famille, Patrie… Et que parmi eux il y avaient toute sorte de mouvements et d’idéologies.
« Est-ce que tous les Français étaient collabos ? », lit-on sur l’un des stands. Non, apprend-on avec soulagement. Comme ça, les auteurs de l’expo ne se fâchent pas non plus avec les Français qui tiennent à la Résistance. Non, les résistants ne sont surtout pas oubliés. Ils sont là… Il ont leur petite place… pas loin de Laval, de Pétain, de Doriot.
Car la vraie valeur, on comprend, est la Diversité. Chacun a le droit d’être ce qu’il est (car nous sommes évidemment tous adeptes de la tolérance, notre suprême vertu).
Sauf qu’une petite voix nous souffle qu’à la date anniversaire de la Victoire 1945 il aurait peut-être été plus judicieux de faire une expo sur la Résistance en y incluant l’histoire de la Collaboration, et non l’inverse…Exposition collaboration
Par ci et par là on trouve également des percées, ou plutôt des morceaux de percées, vers des vérités historiques. Par exemple, après avoir compris qu’en gros les Vichystes étaient essentiellement patriotes, on tombe sur une vidéo où M. Denis Peschanski, l’un des concepteurs de l’exposition, explique que la cause patriotique de la Collaboration tombait progressivement à l’eau à mesure que l’occupant assoyait son pouvoir. Mais tout cela est extrêmement, extrêmement dilué… Sur ce plan il y a même une étrange ressemblance avec l’exposition sur la Seconde Guerre Mondiale à l’Hôtel des Invalides où tout est mélangé sans un moindre parti pris condamnant le fascisme ou l’agression hitlérienne.
Le travail des auteurs est fin, il faut le reconnaître. Il n’est pas facile de trouver une faille trop visible. La trame de l’exposition contient plusieurs strates. Chacun y trouve son compte : le sympathisant de la gauche, le sympathisant du centre, le sympathisant de la droite, le sympathisant de l’extrême droite…
Les seuls avec qui on n’est vraiment pas tendre, sont les communistes. Et cela rime bien avec la tendance actuelle qui vise à amoindrir à tout prix le rôle des partis et des idées communistes dans la Victoire de 1945. Décidément, on dirait qu’il est des gens qui tiennent à poursuivre l’œuvre des Nazis et des collabos. Les affiches de l’époque montrent les communistes comme anti-patriotes, anti-ceci, anti-cela, ennemis des Français, Les vrais ennemis, etc… Et RIEN dans l’exposition – aucun texte d’aujourd’hui ou d’alors – ne réfute ce que martèle à ce sujet la propagande vichyste.

exposition collaboration 1

Comme nous l’annonce un des textes de l’exposition, le phénomène de la Collaboration « est loin d’être simple ». Il faut essayer de le comprendre. Il faut comprendre tous les aspects de cette réalité complexe, où les grandes causes morales (Patrie, Famille…), côtoient les argumentaires du genre « que pouvaient faire les petits patrons? – soit collaborer soit fermer »…
Mais on s’en doute, que les choses ne sont pas simples. Et on est prêt à les comprendre, à compatir, à pardonner. On est prêt à comprendre les raisons du commun des mortels, la vie du citoyen lambda de l’époque, car on ne sait pas ce qu’on aurait fait à leur place. Aussi, on n’a aucun mal à admettre que tout le monde ne peut être un héros. Là n’est pas le problème.
Le problème est que dans toute cette exposition, RIEN ne met vraiment en valeur l’exploit des Résistants. Rien ne clame que ce qu’ils ont fait est beau, courageux et utile. Et que c’est en fin de compte à eux que nous devons la prospérité de la France de l’après-guerre, la France dont les acquis nous font vivre jusqu’à présent. L’exposition ne suggère nulle part que le modèle à suivre ne serait ni celui d’un collabo, ni celui d’un petit commerçant qui fait ce qu’on lui demande (plutôt que de fermer), mais celui qui a risqué ou donné sa vie pour la survie de la France et pour la Victoire sur le fascisme.
On ne nous parle pas du bien et du mal. On ne nous parle pas non plus du pourquoi.
Pourtant, une exposition dédiée au 70ème anniversaire de la Victoire aurait pu non seulement rendre un véritable hommage à la Résistance, mais s’intéresser aux causes profondes. Poser les questions, pourquoi s’est produit ce qui s’est produit, que serait devenue la France sans la Libération et sans la Résistance, qu’apprend-on de cette amère leçon de l’histoire, et surtout, que faut-il faire pour que tout cela ne se reproduise plus. Car il ne manque pas d’éléments pour développer ces réflexions. Ne seraient-ce que les documents exposés de la propagande vichyste qui font décidément songer au travail des médias actuels.
Mais tout cela ne semble pas préoccuper les auteurs de l’exposition dont le but semble même être d’étouffer la question que faire pour que cela ne se reproduise plus.
On se demande, quelle en serait la finalité ?..
Serait-ce que précisément pour que cela puisse se reproduire ?
On aimerait se tromper…

Célestin Komov

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